Le cerveau humain

Un petit joyau de quelques centaines de grammes. Notre cerveau est si proche de nous par son intimité avec l’esprit, et en même temps si loin de nous par la méconnaissance que nous en avons. Pourtant nous en savons des choses sur lui. Fruit de recherches multimillénaires, le cerveau humain a été ausculté sous toutes les coutures par tous les moyens possibles et imaginables, appréhendé de l’extérieur et de l’intérieur, en fonction et hors fonction. Sans doute est-il au-delà de nos technologies tant il reste mystérieux. Il régit nos pensées, nos sentiments, nos désirs, nos émotions, nos actions, …. Mais qui est-il ? Comment fonctionne-t-il ?

Le cerveau humain, c’est de la matière. De la matière qui produit un esprit puisqu’il est à l’origine de nos activités intellectuelles, de nos pulsions et de nos motivations. Il fait partie des 6 organes vitaux du corps humain. Le cerveau a un chef, le Système Nerveux Central, qui a pour mission de collecter et d’interpréter les informations, qui nous parviennent par nos sens, et de déclencher une réponse adaptée.

cerveau
image de Christian Weidinger

Un peu d’histoire

Il y a bien longtemps que le cerveau intrigue les hommes. Hérophile de Chalcédoine, dans les années 300 avant J-C, (un des premiers à s’être intéressé à la structure du système nerveux humain) avait une passion pour la découpe de ses semblables, pour comprendre comment ça marche sans doute! Mais quand on sait qu’il a découpé des gens vivants, on se laisse à penser qu’il y avait quelque chose de plus profond dans sa motivation. Quoiqu’il en soit, son pote Ptolémée II, pharaon de l’époque, le fournissait en matières premières pour ses recherches. Je me laisse à penser, qu’encore aujourd’hui, être proche des hommes de pouvoir donne certains avantages…

Ce petit détour par l’histoire pour préciser que, même si les progrès techniques, qui ont permis d’avoir des représentations précises d’un cerveau vivant, datent des années 70 (1970 après J-C Winking smile), certains s’y étaient collé avant. Rendons à César ce qui est à César et à Hérophile ce qui est à Hérophile.

La biologie est le point de départ des recherches sur le cerveau. Elle nous permet de comprendre ce que nous sommes. C’est pourquoi j’aimerais dégrossir le travail en commençant par cet article et le fonctionnement du cerveau humain. Avant tout je tiens à être clair avec vous, comme l’a dit George Box: “ Tous les modèles sont faux, mais certains sont utiles”, donc le modèle que je vais vous présenter souffre d’approximations et de simplifications mais il est très commode pour comprendre notre cerveau dans sa généralité.

Les 3 cerveaux ou le cerveau Tri-unique

Le cerveau humain peut être divisé en 3 strates. La première est chargée de nous maintenir en vie. La deuxième est chargée de déterminer si une situation donnée peut nous être avantageuse. Et la troisième nous permet d’avoir conscience de nous et de conceptualiser.

Chaque information ou situation rencontrée passe systématiquement par le premier niveau, qui peut lui permettre d’accéder au deuxième, qui lui permettra peut-être d’accéder au troisième.

Le cerveau reptilien (ou premier cerveau)

Il est rigide et compulsif. C’est lui qui assure nos fonctions vitales, rythme cardiaque, température, respiration mais aussi, plus prosaïquement, c’est lui qui provoque notre agressivité et notre violence lors d’une agression, ou qui nous paralyse ou nous fait courir en cas de danger. Il est fiable mais n’est pas pourvu de réflexion profonde. Tant qu’une information est bloquée dans cette strate, on ne peut espérer un comportement autre que la recherche de ce qui nous rassure.

Le cerveau limbique (ou deuxième cerveau)

Il est en charge de nos émotions, il distingue ce qui est agréable de ce qui ne l’est pas. Il transmettra le message au niveau suivant si nous y avons un intérêt personnel. Que ce soit consciemment ou non, nous portons des jugements de valeur, c’est lui qui en est à l’origine. Et parce qu’il provoque nos émotions, il influence notre comportement. En d’autres termes, une quantité non négligeable de nos comportements est régie par une partie “non-cognitive”,  qui ne provient donc ni d’un raisonnement logique ni d’un jugement moral.

Le néo-cortex (ou troisième cerveau)

Il est le siège de l’intellect (du moins c’est ce qui est généralement admis; la frontière entre l’esprit et la matière étant quelque peu complexe). Il nous rend accessible l’élaboration et la compréhension de ce qui est abstrait, nous sert à élaborer des stratégies. Il nous a permis de créer les arts et le langage (c’est d’ailleurs le langage qui nous permet de partager nos ressentis, nos connaissances et nos interrogations et in fine d’aller toujours plus loin, plus vite, plus haut. De là à considérer que nous sommes supérieurs aux animaux… Qu’en pensez-vous, vous qui lisez ces mots?).

Pour que ce niveau du cerveau nous soit utile, il est nécessaire que le message soit passé par les deux premiers, donc pour pouvoir travailler en groupe et réfléchir, il est nécessaire de se sentir à la fois en sécurité et avoir un attrait pour l’objet considéré.

Nous ne connaissons qu’une (toute petite) partie de l’univers tangible et une toute petite partie (fraction?) de la connaissance. Peut-on considérer le cerveau comme étant la chose la plus complexe de l’univers? Je n’oserais l’affirmer mais, mon opinion est que c’est l’objet le plus complexe qu’il nous est donné d’observer, d’étudier.

Dépoussiérons ces 3 cerveaux

Le modèle que je viens de vous présenter nous vient de Paul Mac Lean qui l’a introduit en 1969. Depuis ces années là nous avons découvert que les structures cérébrales travaillent ensemble et s’influencent mutuellement. Le modèle Tri-unique est donc à prendre pour ce qu’il est, une simplification du réel.

Comment le cerveau humain reçoit l’information

Comme dans tout orchestre, il faut un chef

Le chef du corps humain c’est le cerveau. Il décide de nos fonctions végétatives comme de nos fonctions supérieures. C’est également de lui que nous vient notre personnalité. Il est essentiel pour réguler nos fonctions vitales, en premier lieu nos organes vitaux. C’est d’ailleurs pour cela qu’en cas d’hypothermie, le cerveau commence par ne plus irriguer les extrémités et redirige le sang vers les organes les plus importants. Il est impliqué dans nos prises de décisions, dans la conscience, la mémoire, … Il centralise tout ce qui provient de nos 9 sens (vue, ouïe, odorat, goût, toucher, proprioception, equilibrioception, thermoception et nociception). Oui on vous a menti, vous n’avez pas que 5 sens!

Quand vous êtes assis à table, vous n’avez pas besoin de regarder si vos jambes sont croisées, allongées ou repliées sous votre chaise! C’est la proprioception.

Quand vous êtes sobre et debout, vous ne tombez pas! C’est votre sens de l’équilibre, l’équilibrioception.

En ce moment avez-vous chaud ou froid? Vous le savez grâce à la thermoception.

Si je vous tape vous avez mal (et peut-être moi aussi d’ailleurs!). C’est la nociception.

Tout ça, c’est votre cerveau qui vous le fait savoir, par l’interprétation des informations qu’il reçoit. A un moment ou à un autre votre corps transforme la perception du monde extérieur en influx nerveux (un signal électrique en quelque sorte).

Le Système Nerveux Central (SNC)

Ce signal arrive au SNC, qui en fait une analyse et une interprétation. Et, en fonction de plein de critères, propres à vous-même et à la nature de la situation, votre cerveau va, tel un bon chef, envoyer des ordres (les critères propres à vous- même ça peut être votre expérience, vos préjugés, vos motivations, votre caractère, … ). C’est pour ça que dans une même situation, il y a des comportements différents. Exemple : Si, de part votre activité, vous faites plus souvent face à des comportements oppressants qu’à des situations de bienveillance, il y a fort à parier que la prochaine fois qu’un inconnu vous aborde, vous ayez un comportement distant.

Donc, avant d’envoyer son ordre, vos neurones vont capter l’intensité du signal électrique provenant des nerfs. Ce signal va aller de neurone en neurone par l’intermédiaire des synapses et avec l’aide des astrocytes (en fonction de l’information qui remonte, il reste dans le SNC ou non). En se divisant pour passer par différents neurones, l’intensité électrique va faiblir. Si elle passe sous un certain seuil, elle se stoppe; si elle est au delà elle continue. Après avoir parcouru les zones du cerveau concernées par l’événement en question, elles se rejoignent (ou pas), ce qui a pour effet de réintensifier le niveau du signal (ou pas). Le signal obtenu va déclencher la sécrétion de substances chimiques qui vont à leur tour jouer un rôle dans l’orientation de “l’ordre donné par le chef”, qui est lui même un influx nerveux. Précision sur ces substance chimiques, ce sont d’elles que nous viennent le stress, la faim ou les émotions.

cerveau futuriste

Il ressemble a quoi? Ce cerveau humain.

Il ressemble, vite fait, à un petit chou-fleur mais gélatineux. Globalement on retrouve du blanc (c’est la myéline) et des parties grises (les neurones). Son poids tourne dans les 1kg3 1kg4, cela dépend des personnes et du sexe (pour tout vous dire, globalement les hommes en ont un plus lourd que les femmes). Il contient dans les 100 milliards de neurones. Il est constitué de deux hémisphères (droit et gauche ou gauche et droit si vous préférez); entre les deux, il y a ce qu’on appelle le corps calleux, qui sert à transférer plein d’informations entre les deux hémisphères. Tant qu’on y est, autant vous prévenir de suite que la théorie sur le cerveau droit qui serait plutôt intuitif et émotionnel et le cerveau gauche logique et rationnel, est clairement en train de tomber aux oubliettes. Au profit d’un fonctionnement plus généralisé de nos fonctions cognitives.

Sa protection

Alors, ce chef, comment il se protège?

De deux manières. Une contre les attaques mécaniques et une contre les attaques psychiques.

Protections mécaniques

Il est bien protégé dans la cavité que forme la boite crânienne, ce qui lui assure une protection contre des coups directs. Pour faire face aux répercussions des chocs, il baigne dans un liquide (le liquide céphalorachidien) qui lui évite de taper trop fort sur les parois de la boite crânienne. Il reste à le protéger des microbes, pour ça il lui faut un emballage, ce sont les méninges. Donc pour simplifier, votre cerveau flotte dans un liquide qui est dans un sac qui, lui même, est dans une caisse.

Protections psychiques

Votre cerveau est une zone de travaux permanents. Il construit et déconstruit ses circuits, pour toujours optimiser ses compétences. Son délire à lui, c’est l’efficience. Ceci dit, il peut se permettre de rechercher l’efficience, parce que, quand on pèse 2% du poids du corps et que l’on consomme 20% de l’énergie, on peut se permettre quelques efforts. Ces changements sont en corrélation directe avec vos activités internes  et les interactions que vous avez avec votre environnement. Et pour bien se protéger, votre cerveau adapte sans cesse ses représentations mentales à ses besoins et ses croyances. Et plus une chose est évidente pour vous, moins votre cerveau la remet en cause.

Un bon chef donne l’exemple, donc votre cerveau donne l’exemple

Pendant la deuxième moitié du vingtième siècle, la comparaison cerveau-ordinateur semblait pertinente. Depuis, les découvertes en neuroscience, ont fait perdre de la pertinence à cette comparaison. Il semblerait bien que les capacités du cerveau humain aillent bien au delà de ce que nous arrivons à créer avec du silicium et des algorithmes. Nature 1; humain 0. Pour combien de temps encore?

Pierre-Favre Bocquet

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